Homo industrialis, ou le culte funeste de l’artificiel (PDF).

Notre angle de lecture : La technocène et sa mise en scène anthropique.

La masse de l’artificiel dépasse désormais celle de la totalité du vivant. À noter qu’il s’agit de la masse physique. Quant à l’emprise symbolique, depuis tant de si beaux progrès auxquels nous a habitués la société du spectacle, elle dépasse encore beaucoup plus ce qui pouvait rester de saisie naturelle. C’est la quasi-totalité des comportements, des perceptions, des émotions, des pensées et des actes qui sont désormais avantageusement formatés par l’artifice.

Le problème n’est donc pas de savoir si une société du spectacle verte, durable, démocratique, est possible, mais c’est que si elle l’était, elle serait encore plus spectaculaire ; encore plus mensongère, encore plus aliénante.

Et le fait qu’elle se soit de toute façon définitivement coupée de cette possibilité tout en laissant encore croire que non, est précisément ce qui caractérise le moment spectaculaire qui nous contient : ce leurre que le spectateur écologiquement informé consomme à toutes les sauces médiatiques, publicitaires et politiques possibles.

La conscience aliénée parvenue à ce stade n’est pas superficiellement fausse, mais faussement conscience, véritable hypnose.

C’est cette pollution/falsification/substitution/destruction de la conscience qui constitue le péril fondamental qui menace l’espèce humaine.

Dans cette perspective, l’industrialisation forcenée du monde n’est pas la fin mais le moyen de l’asservissement, de la falsification et de la dénaturation de tout.

De même, la menace écologique, aussi démente soit-elle, n’est qu’un aspect collatéral de la déshumanisation radicale, de la zombification planétaire.

La société du spectacle vise partout et en tout et avant tout l’autonomisation et la domination complète du faux irréversible.

La critique du spectacle est plus que jamais la condition première de toute critique radicale.

Photo : LeBoutillier.