Texte trouvé sur internet, signé Sophie Tlk.
La réforme des retraites va passer. Bien que des économistes aient prouvé les mensonges du gouvernement : non il n’y aura pas une pension minimum de 1200 euros, oui la réforme va davantage impacter les femmes.
Bien que le Conseil d’orientation des retraites (COR) ait prouvé que le système de financement des retraites n’était pas en déficit, les caisses de retraites étant excédentaires de près de 900 millions d’euros, d’après le rapport annuel du publié en septembre 2022.
Bien que les chiffres sur l’espérance de vie prouve qu’un ouvrier vit 13 ans de moins qu’un cadre.
Bien que nous soyons des millions à faire grève et manifester.
Et nous aurons beau prouver, répéter, battre le pavé, la réforme des retraites passera. C’est l’autorité d’un homme qui en jeu.
Un homme malade du pouvoir. Insensible, autoritariste, méprisant.
À travers ses multiples apparitions et interventions, Macron nous fait passer des messages sans aucune ambiguïté ni subtilité.
Première manifestation : lui et ses ministres partent en voyage officiel en Espagne. Le message est clair pour l’avenir : ils n’écouteront pas les arguments du peuple, ni la colère, ni le désespoir.
Manifestation du 16 février : Macron remet à Jeff Bezos la légion d’honneur.
Il dit merci à Amazon de dissimuler 57 % de son chiffre d’affaires réalisé en France pour pratiquer une évasion fiscale massive en déplaçant une grande partie de ses bénéfices vers l’étranger.
Il dit merci à Amazon Web Services qui a émis 55,8 millions de tonnes de gaz à effet de serre en 2018, soit l’équivalent des émissions du Portugal et d’avoir détruit 3 millions de produits neufs en France en 2018.
Il dit merci à Amazon de développer sa présence en France en faisant travailler majoritairement des personnes ayant des contrats précaires, notamment en intérim, qui s’épuisent dans des entrepôts gigantesques.
Il dit merci à Amazon, de détruire 2 emplois à chaque fois qu’il en crée 1.
Il dit merci à Amazon de profiter d’une fraude massive à la taxe sur la valeur ajoutée et donc de renforcer la concurrence déloyale vis-à-vis des petits commerces qui acquittent la TVA et doivent donc la répercuter sur leurs prix de vente.
Il dit merci à toi, Jeff, de contribuer à la destruction des conquis sociaux, au réchauffement climatique, et à la fraude fiscale des 1% les plus riches.
Et à nous, il nous dit : manifestez, je m’en fous ! Je vous emmerde, je préfère décorer un homme de pouvoir serviteur du Capital, pourvoyeur de précarité.
Pendant que la France entière se prépare à la manifestation du 7 mars, Macron prend le large pour aller faire un remake de Tintin – le colon blanc – au Congo qui boit une bonne bière.
La communication est rodée et le message est clair : il s’en CONTREFOUT de nos mobilisations.
Et puis après ce 7 mars où la mobilisation fut massive et déterminée, nous découvrons les propos bellicistes d’un Président et d’un de ses conseillers qui nous mettent au défi.
« Le seul scénario où il lâchera, c’est si Paris est en feu, s’il y a un problème aigu de maintien de l’ordre. Cela ne peut être qu’un scénario extérieur, un mort dans une manifestation, ou un attentat » .
Il n’y a pas de hasard dans la communication présidentielle : ils savent que nous ne mettrons pas le feu à Paris, ils savent que nous ne sommes pas prêts à risquer nos vies.
Macron nous l’a assez répété « nous sommes en guerre ». Il est en guerre.
Contre les conquis sociaux, contre les personnes précaires (ceux qui ne sont rien), contre les musulmans, contre les associations.
Oui, lui et ses sbires provoquent. Ils aiment la violence de la rue car ils peuvent l’instrumentaliser à posteriori.
Cela leur permet de dégainer l’état d’urgence permanent, de pondre des lois telles que la loi « PPL Sécurité Globale » donnant les pleins pouvoirs à une institution policière au service des puissants, au service du Capital, une institution violente et gangrénée par le racisme et la misogynie.
Céder à leur provocation c’est perdre.
Continuer de defiler pacifiquement c’est aussi perdre.
Une des solutions pour faire plier le chef de l’État et le gouvernement serait la grève générale et totale.
Un arrêt complet du pays qui toucherait durement l’économie. Et ça c’est Macron lui-même qui le dit ! Mais il ne prend pas beaucoup de risque en annonçant cela car dans ce contexte inflationniste où des millions de personnes ne peuvent plus manger à leur faim, où le gouvernement veille à la précarisation des plus démunis en refusant les repas à un euro pour les étudiants et en réformant l’assurance chômage, le Président sait qu’il est impossible pour une grande partie de la population de perdre ne serait-ce qu’un seul jour de salaire.
Le système est bien fait : telle une strangulation douce qui laisse passer un mince filet d’air dans nos poumons.
Assez pour survivre mais pas pour vivre.
Si nous voulons que cesse cet acharnement des puissants à nous asservir et nous appauvrir, l’unique question à se poser est : quelle est la plus grande crainte du pouvoir ?
Je repense alors à une citation de Machiavel : « Celui qui contrôle la peur des gens devient le maître de leurs âmes. »
La plus grande terreur du pouvoir, à mon sens, serait donc la disparition de nos propres peurs.
Le pouvoir de quelques-uns ne tient que par leurs capacités à engendrer des peurs : peur de ne pas manger à sa faim, peur de sa police, peur de perdre son emploi, peur d’être stigmatisé, exclu, enfermé.
Alors pour se donner le courage de ne plus avoir peur, nous pouvons continuer à nous réunir en manifestant, en débattant, en organisant la lutte et les blocages, car il est rassurant de savoir que nous sommes des millions.
Nous pouvons écrire et témoigner pour exorciser les dites-peurs.
Et nous pouvons relire ces quelques phrases de Günther Anders pour rester éveillés :
« Le conditionnement produira ainsi de lui-même une telle intégration, que la seule peur (qu’il faudra entretenir) sera celle d’être exclus du système et donc de ne plus pouvoir accéder aux conditions matérielles nécessaires au bonheur. L’homme de masse, ainsi produit, doit être traité comme ce qu’il est: un produit, un veau, et il doit être surveillé comme doit l’être un troupeau. Tout ce qui permet d’endormir sa lucidité, son esprit critique est bon socialement, ce qui risquerait de l’éveiller doit être combattu, ridiculisé, étouffé… Toute doctrine remettant en cause le système doit d’abord être désignée comme subversive et terroriste et ceux qui la soutiennent devront ensuite être traités comme tels. »


